Les échos & le fil loup

Published on 20 septembre 2023 |

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Quand on parle du loup

Pour sûr, le loup y est. Dans les campagnes et dans l’actualité.

Il y avait eu cette polémique en tout début d’été sur le nombre de loups présents, l’OFB avait alors annoncé un peu plus de 900 animaux. Au grand dam des éleveurs qui notaient pour leur part une recrudescence des attaques sur les troupeaux. Et chaque fois qu’il y a un loup, il fait les gros titres comme encore tout récemment dans l’est de la France. Mais comme pour tous les dossiers problématiques et controversés, il faut chercher la petite bête et trier le bon grain au milieu des effets de manche… Ainsi, le chiffre avancé avant l’été, un peu plus de 900 individus, n’était qu’une projection, une estimation, pas au doigt mouillé mais certains y ont vu une manipulation grossière pour diminuer le contingent des animaux prélevables dont le nombre est indexé sur le cheptel…

En fait, ce nombre était surtout en attente d’une première consolidation avec la publication des résultats des enquêtes de l’hiver. Le nouveau chiffre, autour de 1 100 individus, (1 104 dans 55 départements pour être précis, + 20 % en 12 mois) plus conforme probablement avec ce que peut être la réalité, fut publié il y a quelques jours. Mais ce n’est pas la seule polémique lupine en cette rentrée. Il y a aussi, à ce tableau de chasse, la sortie de la présidente de la Commission européenne, Ursula Von Leyer, appelant à questionner le statut du loup en Europe, façon implicite de remettre en cause la protection unilatérale dont il fait l’objet. Si vous voulez tout savoir sur la manière dont sont comptés les loups par la méthode capture-marquage-recapture (de l’ADN sans ce cas précis), c’est par ici.

Et si l’on parle, ma foi, autant du loup ces temps-ci, c’est qu’en France une échéance particulière était attendue pour ce lundi : la révision du plan loup qui va présider aux règles de gestion ces prochaines années, pour la période 2024-2029. L’idée étant, bien entendu, d’adapter les règles aux évolutions enregistrées depuis l’entrée en vigueur du plan précédent en 2018. La première conséquence de ce plan, encore à l’état de projet, est qu’il aura fait fuir les organisations de défense de l’environnement et du loup. Ils ont claqué la porte de la réunion de présentation ce lundi, à Lyon. De l’autre côté de la clôture, les éleveurs ne sont pas non plus très satisfaits des annonces. Trop peu pour les uns, bien trop pour les autres

Mais quelles sont donc ces propositions ?

On trouve pêle-mêle : une réforme des modalités de comptage, l’étude d’un déclassement potentiel au niveau européen (coucou Ursula) du loup d’espèce « strictement protégée » à « protégée », la réduction des délais d’instruction des dossiers d’indemnisation des éleveurs touchés, la mobilisation de crédits supplémentaires pour déployer les moyens de protection dans les zones de colonisation et des recherches menées pour mieux protéger les troupeaux dans les zones bocagères, nouveaux territoires pour le loup. Sont également prévus la création d’un statut de chien de troupeau, le développement de la louveterie, la dotation en lunettes thermiques pour la chasse, le renforcement des prélèvements en début de saison, l’évolution possible (à la hausse) du taux de prélèvement, 19 % actuellement. Entre autres. 

Où l’on se rend compte que la France est le pays qui compte le plus d’animaux prédatés par le loup et que les cadres sont, finalement, assez semblables d’un pays à l’autre.

Pour bien comprendre les orientations proposées, il n’est pas inutile de plonger le nez dans l’analyse comparative des politiques publiques de gestion du loup publié ce mardi qui met en regard les politiques de gestion du loup dans six pays européens. Où l’on se rend compte que la France est le pays qui compte le plus d’animaux prédatés par le loup et que les cadres sont, finalement, assez semblables d’un pays à l’autre. La seule véritable exception française étant la prise en charge du salaire du berger. C’est passionnant. En attendant, le ministre de l’agriculture Marc Fesneau est dans les Hautes-Alpes cet après-midi pour expliciter les mesures du plan.

© archives Yann Kerveno

Si ce sont les éleveurs qui sont à la pointe du combat en France, de l’autre côté des Pyrénées, ce sont surtout les chasseurs qu’on entend…et certains scientifiques qui réclament un contrôle du loup au nom de la biodiversité. La question est d’autant plus sensible depuis que le loup est devenu « non chassable » sur l’ensemble du territoire espagnol il y a pile deux ans. Les chasseurs et les communautés autonomes qui hébergent le plus d’exemplaires du fameux loup ibérique, à savoir celles du nord ouest du pays, Galice, Cantabrie, Asturies (où l’on dépose des têtes de loup devant une mairie et où l’animal est devenu un pur sujet électoral) ainsi que Castille et Leon qui font pression sur l’exécutif pour revenir à la situation qui prévalait jusqu’alors. Au motif, intellectuellement imparable, que, sur leur territoire, l’espèce n’est pas menacée et que les attaques augmentent. Et que l’État ment sur le nombre de loups, les seuls chiffres disponibles remontant à… 10 ans !

La sortie d’Ursula Von Leyer sur la révision du statut du loup aura donc réjoui la droite et l’extrême-droite espagnoles qui ont fait campagne pour la reprise de la chasse aux loups,..à défaut de sorcières ? Sauf qu’en dépit de sa nouvelle protection, le loup ibérique n’est peut-être pas sorti d’affaire, finalement, question de génétique. Selon une étude récente, si les populations augmentent en effet, elles par contre ont grandement perdu en diversité génétique. Au point que les chercheurs craignent pour la survie à long terme de l’espèce. Et ce alors qu’un nouveau venu semble avoir pointé son nez dans la péninsule, le chacal doré.

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