Les Échos #24-2025
Un nouveau fléau pour les abeilles, une histoire de sandwiches comme fait de société, le blé comme arme et le recul des terres agricoles dans le monde, ce sont les échos du 19 septembre 2025 !
Visuel : © archives yann kerveno
Voilà une histoire formidable (même si elle a sept ans) que celle racontée par Sam Knight dans les colonnes du Guardian. Il explique dans un (très) long papier, comment le sandwich triangle emballé et réfrigéré a révolutionné le Royaume-Uni, depuis son invention au début des années 1980 jusqu’à un marché à plusieurs milliards de livres sterling (en 2017). Il a tellement envahi le quotidien qu’à la fin du XXe siècle, « il y avait plus de personnes qui fabriquaient et vendaient des sandwichs en Grande-Bretagne que de personnes travaillant dans l’agriculture » note-t-il. Et qu’il est, pour certains, un élément d’émancipation vis-à-vis de la société. Rien que ça. Moins réjouissant mais tout aussi signifiant, les apiculteurs des États-Unis ont connu cette année une hécatombe sans pareil qui a emporté plus de la moitié des ruches du pays (55 %). C’est la pire année depuis 2010 et la mise en place d’un réseau de surveillance… Principale cause avancée, le varroa, un parasite des abeilles qui a développé une résistance aux acaricides conventionnels, auquel s’ajoutent les autres menaces habituelles, expositions aux pesticides, pertes d’habitat… Avec, à la clé, un manque à gagner estimé à plus de 400 millions de dollars pour les agriculteurs dépendant des ruches pour la pollinisation des cultures. Il a par exemple manqué 500 000 ruches en Californie ce printemps. Et ce n’est pas tout, arrive en effet un autre prédateur redoutable, Tropilaelaps mercedesae qui, parti d’Asie, semble bien en route pour conquérir le monde…
Revenons de ce côté de l’Atlantique pour regarder un peu vers l’Oural. Alors qu’à la mi-septembre, le prix des pommes de terre raclait le sol à 15 euros la tonne et que le blé a plongé sous la barre psychologique de 190 euros la tonne, il n’est pas inutile, pour bien comprendre ce qui se joue sur les marchés, de se laisser prendre par ce long article consacré au blé et à son pouvoir géopolitique. Ou plutôt l’outil qu’il est, et a toujours été, aux mains des États que ce soit pour des motifs domestiques ou externes. On y apprend notamment, si vous l’ignoriez, que seules 2 % des transactions menées en bourse sur le blé sont reliées à des volumes existants, le reste n’étant que spéculation.
S’il est une affaire qui semble bien mal engagée, c’est celle de la reconquête de 5 points de souveraineté en France sur la production de fruits et légumes d’ici 2030. Selon les statistiques divulguées par le ministère de l’Agriculture, les surfaces en production continuent en effet de reculer. Par exemple, on est à – 3 % sur 5 ans en pomme, – 8 % pour les pêches, – 10 % pour les abricots… À l’échelle du monde, on peut en revanche noter les progrès de l’agriculture en termes d’efficacité, permettant de pallier ses pertes de terrain depuis le début du siècle, moment où elle a atteint son pic de consommation de terres. Trois chercheurs ont livré leur analyse à la BBC et prédisent que ce recul va s’accentuer, au profit des espaces naturels. « Depuis 1961, les données de la FAO montrent que les gains de productivité ont permis d’éviter la mise en culture de 1,8 milliard d’hectares (soit environ 35 fois la superficie de l’Espagne) » écrivent-ils. Mais, vous le savez si vous êtes familiers des échos de Sesame, les choses ne sont jamais simples. Et ils tempèrent leur enthousiasme par exemple lorsqu’ils évoquent le recul de la consommation de viande d’ovins ou de bovins, grands consommateurs d’espace, au profit de celle de volaille ou de porcs, qui implique de tuer plus d’animaux pour un volume similaire. Ou lorsqu’ils expliquent aussi combien les fibres synthétiques ont réduit les besoins en laine ou en coton, et donc les surfaces mobilisées pour ses productions, mais créent d’autres problèmes, telles les pollutions aux plastiques et les dépendances aux hydrocarbures.