Sciences et société, alimentation, mondes agricoles et environnement


Les échos & le fil

Publié le 31 mai 2019 |

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Les échos #20-2019

Par Yann Kerveno

Après son retrait du capital de l’entreprise Beyond Meat (productrice de steaks végétaux au goût de viande et valorisée à plus de trois milliards de dollars après son entrée à la bourse de New York qui annonce son arrivée en Europe), le géant américain de la volaille Tyson Foods a annoncé lancer ses propres produits végétariens d’ici quelques mois. Autre géant américain, Cargill, vient lui d’investir dans la société Aleph Farms qui développe de la viande de culture. À Londres, ce sont les artistes qui ont été invités à réfléchir sur l’alimentation de demain, un point de vue décalé qui met en lumière les préoccupations de notre temps pour ce qui a vocation à être mangé (expo à voir à Londres jusqu’au 20 octobre). On parle beaucoup du steak sans viande ou du steak de culture certes, mais sachez que dans l’ombre se développent également de l’œuf sans œuf et du poulet sans poulet.


De l’autre côté du spectre, la bio a des états d’âmes, inéluctables, avec le renforcement de la grande distribution sur la commercialisation des produits. La question n’est pas nouvelle qui irrigue les débats depuis trente ans, entre les partisans d’une adaptation à la demande du marché, donc une démocratisation accrue et la tentation du repli isolationniste sur une production à cahier des charges plus drastique. Pour conserver l’esprit, ce que la sociologue Sophie Dubuisson Quellier appelle « une consommation ostentatoire, qui correspond à un groupe social, le fédère et suscite le rejet des autres. On consomme pour ressembler à son groupe ou se distinguer. » Mais il n’est toujours pas question d’obligation de résultats dans les pistes de progrès évoquées. Mais en attendant, si nous mangions des pommes comme disait l’autre ?


On en sait maintenant en effet un peu plus sur l’histoire d’un des fruits les plus répandu au monde. Fruit qui serait aussi un de ceux qui a le plus précocement voyagé, le long de la route de la soie, s’hybridant au fil du temps pour créer la pomme moderne issue de quatre variétés historiques.

En parlant de croisements et d’hybrides, il y a cette info, en complément de notre thread sur les ravageurs de nos cultured, avec la création récente par la nature de nouveaux insectes ravageurs (Helicoverpa armigera x Helicoverpa zea, noctuelle de la tomate et chenille de l’épi de maïs). Un croisement particulièrement inquiétant qui échapperait aux moyens habituels de contrôles (étude complète ici). À Nîmes, le loup (notre thread sur la question du loup ici) qui hantait les nuits des Costières a finalement été abattu en début de semaine suite à l’autorisation de tir accordé par la préfecture. En avril, c’est une voiture qui avait tué un loup sur l’autoroute aux portes de Fréjus. En Allemagne, les règles de chasse au loup ont, elles, été assouplies pour endiguer la prolifération et les éleveurs d’ovins français, la barre des 500 individus semblant avoir été bel et bien dépassée, ont réclamé le droit d’armer les bergers pour procéder à des tirs d’effarouchement.


Avec les beaux jours (si si ils arrivent) vous reprendrez peut-être vos belles résolutions, sortir dans le jardin, mettre de l’ordre dans ces végétaux que vous avez laissé aller à leur guise ! Mais cette année, il n’y a plus moyen d’avoir recours au même attirail de molécules qu’avant pour y mettre bon ordre. Dans Le Figaro, Marc Mennessier se demande s’il est raisonnable de soigner les plantes par les plantes. That is the question. En 2012, la société d’horticulture de France s’était penchée sur la question et avait passé au crible les études portant sur le purin d’orties. Pour conclure, au final, qu’il était difficile d’accorder à ce type de décoctions un quelconque effet curatif… 


Allié du jardinier, le compost fait aussi l’objet de recherches poussées, notamment par l’Irstea qui insiste sur l’importance des dispositifs dits de proximité, en compostage voir en méthanisation. Outils qui auront un rôle majeur à jouer à partir de 2025 avec la mise en place du tri des biodéchets. L’institut a d’ailleurs présenté un pré-fermenteur destinés aux cuisines d’établissements, capable d’abattre 60 % du volume des déchets alimentaires en deux semaines.

Aux États-Unis, l’agriculture fait face cette année à des inondations catastrophiques. La moitié du maïs de l’Iowa n’était pas toujours pas semée et seuls 19 % des sojas étaient en place la semaine dernière. Dans une tribune donnée au Washington Post, Art Cullen insiste sur la nécessaire révolution que doit mener l’agriculture américaine. Plutôt que d’attendre que l’État fédéral allonge des milliards de dollars pour éponger… à défaut des champs, au moins les pertes économiques des agriculteurs comme vient de le faire Donald Trump. « Nous subventionnons les cultures de maïs, les élevages de porcs pour le marché chinois, nous maintenons juste les agriculteurs à flots. Les seuls qui tirent bénéfice de tout ceci sont les traders, les marchands de semences, les producteurs d’intrants et la Chine » souligne même un ancien responsable de l’administration Obama.


La question a aussi surgi en France avec l’expédition d’un référé de la Cour des comptes au Premier ministre. Document qui note que la France est passée de la place de deuxième à sixième exportateur mondial de produits agricoles. La Cour remarque avec ironie que ce déclassement se produit en dépit des aides et de la publication de neuf plans stratégiques sur le sujet en sept ans… (Texte complet du référé ici). 

Enfin, nouvel épisode de Gog (Game of Glypho). En Bretagne, l’association Eaux et Rivières se félicite que son appel à la délation des parcelles traitées au glyphosate ait été entendu avec plus de 400 dénonciations. Un maire breton fit aussi bien parler de lui en prenant un arrêté municipal pour interdire interdisant l’utilisation des produits phytos dans un rayon de 150 mètres de toute parcelle cadastrale contenant une habitation. Compte tenu du mitage de la campagne, on imagine le  bazar que cela peut représenter pour les agriculteurs locaux. Un précédent, en Charente, avait vu l’arrêté invalidé par la préfecture l’an dernier et la FDSEA locale préparait un recours. Dans ce contexte délétère, on va finir par ne plus compter les agressions d’un camp contre l’autre. En Lot-et-Garonne, c’est une promeneuse qui a été agressée pour arborer un autocollant antipesticide sur sa voiture, tandis qu’en Charente-Maritime, c’est un agriculteur qui a été attaqué dans son champ pendant qu’il travaillait, c’est la quatrième agression recensée depuis le début de l’année envers les agriculteurs.


Le Figaro lui explore un angle jusqu’ici délaissé du dossier. Le renchérissement des coûts de copropriété liés à l’interdiction du glyphosate. Le diable, c’est bien connu, se niche dans les détails ! Comme celui peut-être de la déclaration du directeur général de l’Anses sur Europe 1 à la mi-mai expliquant que cette molécule ne présentait pas de problèmes dans les conditions normales d’utilisation ? Allez savoir.

L’Anses vient par ailleurs de prononcer le retrait du marché d’une autre molécule dont l’effet de perturbateur endocrinien fait consensus même s’il présente un danger, mais pas de risque pour l’ensemble des populations. Le détail qu’on vous dit.

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