Les échos & le fil Archives yann kerveno

Published on 26 juin 2024 |

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Apprendre à marcher sans bruit

Avant de partir en rando, vous feriez mieux de réviser votre manuel de savoir-vivre en pleine nature ! Dans ce le fil du mercredi 26 juin 2024, Sesame vous emmène dans les lacets de la rando, des sports de pleine nature et de leur impact sur le milieu naturel.

Visuel : © archives Yann Kerveno

L’été, les soirées qui traînent, l’envie d’être dehors et voici les randonneurs pris de fourmis à l’approche des congés. La randonnée a le vent en poupe dans toutes les régions de France et le réseau de sentiers pédestres balisés est une aubaine pour qui veut prendre l’air de cette manière, à la journée ou sur plusieurs jours. Selon le Pôle ressources national, 16 millions de Français avaient randonné en 2016 tandis que la Fédération française estime pour sa part que nous sommes 27 millions à nous adonner à ce sport, devant le vélo et la natation. Alors pourquoi parler de cela ? Parce que la multiplication des randonneurs n’est pas sans poser de nouveaux problèmes, en particulier de cohabitation et de pression avec et sur le milieu. Sans parler du développement des autres sports dits « de pleine nature », également en plein essor depuis le Covid, qui déplace en partie des conflits d’usages vers la sphère des pratiquants amenés à parfois s’opposer entre eux. Mais ceci est un autre sujet, revenons sur le bon sentier.

Capacité de charge

Il y a quelques semaines, la Fédération de randonnée pédestre et l’Agence nationale de cohésion des territoires ont publié un livre blanc consacré à la gestion des sentiers de montagne qui, par leur fragilité particulière, cristallisent les soucis. Dans un entretien passionnant, les géographes Pierre Torrente et Lionel Laslaz y font le tour des problématiques et des différentes approches observées. « Ce qui est difficile dans cette histoire » fait remarquer le géographe Lionel Laslaz, c’est de définir à partir de quel moment la fréquentation est jugée trop importante. Parce que la « capacité de charge » concept emprunté à la biologie,  varie beaucoup dans le temps et l’espace. » Et chaque partie prenante du dossier va avoir sa propre définition, l’écologue, l’aménageur, l’opérateur touristique…


POUR ALLER PLUS LOIN, VISIONNER LE REPLAY BORDERLINE. En croisant les analyses universitaires et les expériences de terrain, la dernière rencontre BorderLine, “Surtourisme : une fréquentation contre nature ?” coorganisée par la Mission Agrobiosciences-INRAE et le Quai des Savoir, proposait le 23 avril dernier de s’interroger sur le concept même de “surtourisme”, les atouts mais aussi les limites du tourisme vert. Quels jalons poser pour une fréquentation véritablement durable et partagée des espaces naturels ?

AVEC LES PARTICIPATIONS DE : Florian Chardon, Steve Hagimont, Charlotte Michel et Pierre Torrente.

Moins fort !

Les impacts sont toutefois aujourd’hui bien connus, et listés. Depuis la pollution par les déchets, la dégradation de la végétation, jusqu’à la perturbation de la faune en passant par le risque d’incendie. Avec un facteur aggravan, l’altitude. Une étude récente menée aux États-Unis met même en évidence l’impact de la pollution sonore des espaces naturels, et montre que les voix humaines peuvent être plus perturbantes pour la faune sauvage que le bruit d’un 4×4… Un constat particulièrement valable pour les herbivores, un peu moins pour leurs prédateurs habituels. L’étude montre aussi que l’effet du dérangement perdure dans le temps, jusqu’à plusieurs jours…

No pasarán

Il y a quelques mois en France, un nouveau front s’est ouvert, celui de la propriété privée contre le randonneur ou l’alpiniste. Un projet de loi de dépénalisation de l’accès à la nature présenté par la députée Lisa Belluco visait à faire tomber la protection accordée par la loi de 2023 (contre l’engrillagement) aux espaces naturels en propriété privée. Et le droit accordé aux propriétaires d’en interdire l’accès contre la suppression des clôtures afin de laisser la faune libre de circuler. Le projet de loi fut repoussé mais l’argumentaire déployé par la députée est symptomatique de notre temps et corrobore l’appétit de nature, et de randonnée, montrée par les chiffres de la pratique. Il colle par ailleurs avec la conception des pays scandinaves dans lesquels l’accès à la nature est un droit qui « dissout la distinction entre espace public et privé au profit d’un espace contractuel. »

Pot de miel

Alors comment gérer ? À la nord-américaine, suivant la stratégie du pot de miel (assez semblable au concept de Land sparing) ? Celle-ci concentre tous les usages sur un nombre réduit de points pour concentrer les désagréments. Ou bien va-ton opter pour une approche i plus libérale comme en Europe, où l’on est libre de circuler où on veut à condition de respecter un léger faisceau de règles ? Déjà, peut-être, en commençant aussi par informer les pratiquants de leurs impacts. C’est un point qui revient souvent dans les constats de mésusages dans les espaces naturels, comme l’a constaté cette enquête de l’Office français de la biodiversité (OFB) réalisée juste après le Covid et l’arrivée de « primo-fréquentants. » Une population nouvelle venue du monde urbain et avec une logique plus marquée de « consommation de l’espace naturel ». Bonne rando !

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