Publié le 20 novembre 2023 |
0FranceAgriTwittos pour redonner de la fierté
Par Yann Kerveno,
Illustration : Copyright © Gilles Sire 2023,
Née en 2017, l’association FranceAgriTwittos, acteur majeur sur Twitter, rassemble environ 500 personnes liées de près ou de loin à l’agriculture. Trois questions à Denis Beauchamp, son président, dans cette deuxième partie du dossier [Agri-influenceurs].
Comment est né ce réseau ?
Denis Beauchamp : Tout est parti d’un groupe de discussion privé et d’une volonté de communiquer sans filtre, en essayant d’être pédagogue, pour expliquer ce qui se fait, ce qui ne se fait pas dans l’agriculture. À vue de nez, 50 % des adhérents de FranceAgriTwittos sont agriculteurs ou agricultrices, 35 % sont issus des mondes connexes à l’agriculture et le reste n’appartient pas à ce milieu. Les gens qui adhèrent à l’association ont un peu tous le même engagement et nous essayons de faire un peu grandir tout le monde dans l’usage des réseaux sociaux.
Existe-t-il une coordination pour l’élaboration des messages, le choix des thèmes ?
Non, chaque membre est autonome dans sa parole. Nous souhaitons pouvoir parler de tout sans tabou. L’idée de départ c’était vraiment la communication positive. Le but n’était et n’est toujours pas de tout repeindre en rose mais, quelque part, de redonner de la fierté aux agriculteurs. Si nous ne le faisons pas nous-mêmes, personne ne le fera à notre place ! Nous avons produit un petit guide du savoir bien communiquer avec les trucs pour survivre sur les réseaux sociaux, on recommande l’empathie, on conseille de réfléchir avant d’écrire, d’être respectueux, constructif, de susciter l’adhésion, de ne pas sauter à la gorge des « haters »…
Avez-vous été approchés par les syndicats en particulier ?
Je ne sais pas s’il y a eu de l’entrisme, nous avons parmi nos membres des sympathisants de tous les syndicats. Mais nous essayons d’avoir le plus de recul possible. C’est vrai qu’au début il y a eu des approches, on nous a proposé des financements dont on n’a pas besoin en tant qu’association. C’est venu des mondes de l’assurance, de la banque, qui nous ont demandé de quelle manière ils pouvaient nous aider. Ils nous ont peut-être vus comme des influenceurs potentiels comme on en voit sur YouTube ou TikTok. Mais ce n’est pas allé plus loin.
Du côté des syndicats
Une partie de la communication du monde agricole vers la société passe par la plateforme « Agridemain, un pont entre l’agriculture et la société » et ses ambassadeurs. Malgré nos demandes répétées (téléphone, mail, sms), ni la FNSEA ni la Confédération paysanne n’ont été en mesure de répondre à nos questions. Seule la Coordination Rurale (CR) a bien voulu soulever le capot de sa stratégie par un échange de mails. « La CR et ses adhérents se servent des réseaux sociaux pour faire de la veille et est attentive à la désinformation autour des pratiques des agriculteurs […]. La Coordination rurale fait un important travail de déconstruction quant aux fausses informations qui circulent. » Les réseaux sont aussi utilisés pour communiquer auprès des agriculteurs, du grand public ou de cibles plus précises. « X (ex-Twitter) va servir pour l’adresse aux politiques et aux journalistes. Facebook sera, lui, axé sur les agriculteurs eux-mêmes car il s’agit d’un réseau social encore fortement utilisé par cette catégorie socioprofessionnelle. » Le syndicat utilise aussi les réseaux pour faire valoir la spécificité qu’il met en avant, être un syndicat de solutions : « Il ne s’agit pas uniquement de se plaindre à travers les réseaux sociaux mais de faire entendre les idées que la CR porte pour répondre aux enjeux du secteur. » Pour mieux toucher les internautes et générer de l’engagement le syndicat a modifié sa manière de faire et s’appuie sur des visuels pour faire passer ses messages. Enfin, il y a le marketing « Nous relayons nos actions syndicales (manifestations, salons, conférences…) car, au-delà des belles images que ces actions offrent, cela montre surtout que nous sommes sur le terrain et à l’écoute. La défense des agriculteurs est toujours au cœur de notre action. Ce qu’il faut donc valoriser, c’est l’humain, tous les hommes et les femmes derrière nos actions. »
Des abonnés par dizaine de milliers
Qui sont les agri-influenceurs qui parlent principalement à leurs pairs et au grand public ? Ils sont éparpillés sur tous les réseaux. Nommons entre autres, parmi les plus connus et médiatiques sur Youtube, Étienne Fromont, dit « Étienne agri youtubeurre », éleveur laitier dans la Sarthe (113 000 abonnés) ; Thierry Baillet, dit « Thierry agriculteur d’aujourd’hui », (103 000 abonnés) ; mais aussi Stervio (423 000 abonnés) ou David Forge et sa Chaîne agricole (123 000 abonnés). Sur TikTok, se démarque Marc-Antoine Dumoulin, « Agricoolteur » (410 000 abonnés). Enfin sur Twitter, citons le vétérinaire « Dr Toudou » (45 000 abonnés) et l’éleveur laitier Antoine Thibault (42 300 abonnés)…