Publié le 15 novembre 2024 |
0PAC : 842 milliards et nous et nous
Finalement, quand on regarde de près, la Politique Agricole Commune (PAC), c’est petit bras ! Un rapport d’évaluation de l’OCDE permet une plongée éclairante dans les mécanismes de soutien à l’agriculture mondiale où les méchants ne sont pas forcément ceux qu’on imagine. Néophytes bienvenus dans ce fil du 13 novembre 2024 !
À ne pas regarder dehors, on oublie souvent de voir ce que font les autres. Et s’il est un truc qui se dénigre facilement par ici en France et chez nos voisins, c’est bien la PAC de l’Union européenne que l’on accuse souvent de tous les maux. Mais l’herbe est-elle plus verte ailleurs ? Faut voir et le tout récent rapport de l’OCDE sur le sujet, « Politiques agricoles : suivi et évaluation », est bien plus qu’une entrée en matière pour qui voudra bien s’y intéresser. Il couvre 54 pays. Qu’y trouve-t-on ? Que l’Europe n’est pas la seule à subventionner son agriculture, bien loin de là.
Pour la période 2021-2023, étudiée dans le rapport, les soutiens à l’agriculture ont ainsi représenté la modique somme de 842 milliards de dollars par an pour la cinquantaine de pays couverts. Une somme encore « largement supérieure » à ce qu’elle était avant l’épisode Covid 19, précise le rapport qui note également que « la hausse de la production conjuguée au maintien de prix élevés a augmenté la valeur créée par le secteur, contribuant ainsi à réduire la demande de soutien. Le renchérissement des prix mondiaux des produits de base a fait diminuer le soutien des prix de marché (SPM) de 28 milliards USD ou 8 % entre 2021 et 2023, tandis que le soutien budgétaire baissait dans le même temps de 30 milliards USD (ou 10 %). »
Deux formes
Les soutiens peuvent prendre deux formes, directement aux agriculteurs ou aux consommateurs de produits agricoles. L’essentiel du paquet avec (629 milliards de dollars) est perçu directement par les producteurs sous forme de soutien au prix de marché (334 milliards – pour tenir les prix intérieurs au dessus du cours mondial) ou du soutien budgétaire (295 milliards) mais certains pays, comme les États-Unis, ont fait du soutien au consommateur le fer de lance de leur politique agricole (pages 16 et 17 vous trouverez le détail et les distorsions provoquées).
Mais ce qui est intéressant, c’est aussi de regarder qui aide quoi. Et comment les choses ont évolué. Le rapport précise que 80 % des soutiens sont le fait de « quatre grandes économies », la Chine qui représente 37 % des sommes dépensées et/ou investies, les États-Unis (15 %), l’Inde (14 %) et l’Union européenne (13 %). Il y a 25 ans, l’Europe était l’acteur principal avec 26 % des soutiens devant les États-Unis (20 %) et le Japon 16 %, quand les aides de la Chine et de l’Inde cumulées « n’atteignaient pas 15 %/ ». Un grand absent dans ce classement, et pour cause : le Brésil, grand pays agricole qui compte pour 5 % de la production mondiale ne « pèse » que 1 % des soutiens.
40, 20 et moins de un pour cent
Les soutiens nets à l’agriculture représentent en moyenne, dans les 54 pays étudiés, 9 % des recettes agricoles brutes des producteurs mais les disparités sont énormes. Dans certains pays, les subventions représentent plus de 40 % des recettes agricoles brutes (Norvège, Islande, Corée) quand elles sont sous la barre des 20 % (mais supérieures à la moyenne) en Europe, en Chine, et comprises entre 5 et 9 % aux États-Unis ou au Canada et sous les 1%en Nouvelle-Zélande ou en Ukraine.
L’ODCE s’est doté de ses propres indicateurs, l’EST (estimation du soutien total), l’ESP (estimation du soutien aux producteurs), l’ESSG (soutien aux services d’intérêt général) et l’ESC (soutien aux consommateurs). Le rapport fait remarquer que sur les 842 milliards de soutiens positifs engagés chaque année durant la période concernée, 75 % sont allés aux producteurs à titre individuel (ESP), 12,5 % aux consommateurs (ESC), 12,5 % à l’intérêt général (ESSG). On y apprend aussi que seul un quart des soutiens apportés à l’agriculture l’est sous conditions (environnement, bien-être animal) dont la plus grosse partie est constituée de contraintes obligatoires sur les intrants.
Voilà pour les grandes lignes, suit une analyse pays par pays c’est passionnant pour faire des comparaisons (qui ne sont pas raison !) Bonne lecture !