Published on 21 mars 2019 |
2[Méthanisation] Quand les collectivités locales s’en mêlent
À Locminé, en Bretagne, la méthanisation n’est pas une fin en soi mais davantage un outil au service de la recherche d’une certaine indépendance énergétique. Directeur de la société d’économie mixte Liger, Marc Le Mercier précise l’ampleur du projet.
Comment une collectivité locale peut-elle se saisir d’une telle question ?
Marc Le Mercier : Nous sommes partis de zéro, c’était un joli challenge. Lorsqu’on s’est lancés, la méthanisation commençait à se développer mais les retours n’étaient pas forcément très favorables sur la viabilité du modèle économique. L’idée a pris corps au moment de l’étude d’un projet de construction d’un centre aquatique, nous nous sommes dit alors qu’il fallait le chauffer avec des ressources de notre territoire, nous étions alors en 2010, et nous savions que le prix de l’énergie n’allait pas cesser d’augmenter. Notre chance c’est que notre territoire est fortement industrialisé, avec des grands noms de l’agroalimentaire, Jean Floch, Cecab… Plutôt que de construire un méthaniseur, nous avons travaillé à la création d’un centre de production d’énergies renouvelables qui combinerait plusieurs techniques et outils, dont la méthanisation.
À partir de là qu’avez-vous développé ?
C’est une filière bois qui est d’abord mise sur pied, avec une chaudière qui délivre 1,6 mégawatt et sert à alimenter en chaleur le centre aquatique, mais aussi un collège, un lycée, une maison de retraite, une salle de spectacle… Nous avons tout de suite ajouté de la méthanisation, mais pas sur le modèle allemand, nous avons fait des choix différents et nous ne regrettons pas. Produire du biogaz et être pragmatiques, en faire du carburant, du biométhane carburant, c’est ce que nous avons fait pour notre flotte de véhicules.
Et la méthanisation à la ferme ?
C’est aussi une des particularités de notre projet. Plutôt que d’aller chercher de la matière première dans les fermes, nous nous sommes dit qu’il était plus judicieux d’aller y chercher du biométhane. Nous avons donc travaillé sur le développement d’unités de biométhanisation très standardisées à installer dans les fermes. Ce sont des installations à 1,7 million d’euros, avec un seuil pour pouvoir y accéder, pouvoir produire quarante-cinq normo mètres cubes à l’heure de méthane. Nous avons une dizaine de candidats pour le moment. Il faut raisonner comme les pétroliers, utiliser l’ensemble des produits, produire de l’énergie, être capable de la stocker, mais aussi pouvoir, derrière, récupérer les phosphates, le potassium, utiliser l’azote, produire des biocombustibles et des biofertilisants… Produire de l’électricité avec le méthane ne valorise que 38 à 40 % de la matière entrant dans le digesteur. On ne peut pas passer la facture avec 40 % de rendement. La méthanisation tout seul, c’est mort.
Propos recueillis par Yann Kerveno
Merci. Bonne synthèse.
Une question : je recherche des arguments probants sur la qualité fertilisante des digestats et sur la façon d’éviter les infiltrations dans le sol de composants liquides néfastes pour la qualité de l’eau des sources.
Ce point ou ces 2 points liés constituent la vraie réticence des agriculteurs sérieux. On peut trouver des solutions économiques rentables, mais les 2 points signalés doivent être surmontées pour oser se lancer. La littérature est difficile à trouver (exemple : étude Région PACA / ADEME).
Courtoisement.
Bonjour, peut-être pouvez vous interroger l’Irstea à ce sujet ? Sinon, il y a cette étude maintenant ancienne de Solagro https://solagro.org/images/imagesCK/files/publications/f35_qualiteagrodigestatssolagro2004.pdf et cette synthèse publiée par l’ITAB http://www.itab.asso.fr/downloads/echo-mo/article_echo_mo_93.pdf