Sciences et société, alimentation, mondes agricoles et environnement


Les échos & le fil

Publié le 7 juin 2019 |

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Les échos #21-2019

par Yann Kerveno

Avec le printemps, les mauvaises herbes sont légions, Alexandre Carré a livré un thread intéressant sur le désherbage, loin de l’image d’Épinal qui voudrait nous faire croire qu’avant, c’était mieux !


Dans l’actualité également, la publication du rapport de l’Observatoire de la formation des prix et des marges qui constate une progression des prix des produits agricoles en 2018. Progression globale qui ne profite cependant pas à tout le monde, puisque les filières blé dur, porc et bovins enregistrent un recul des prix payés. Mais le rapport est resté prudent sur l’évaluation de la loi Egalim, il faudra attendre l’année prochaine pour en savoir plus.

S’il en est une qui ne connaît pas trop de problèmes de prix, c’est bien la Bio. Restée bien silencieuse dans tous les débats qui agitent l’agriculture conventionnelle elle se retrouve aujourd’hui sous les feux de la rampe. Avec un risque image non négligeable à gérer.


Il y a d’abord eu la polémique sur le chauffage des serres et la possibilité de faire pousser des tomates bios en hiver. Un débat où s’incarne la vieille querelle entre les gardiens du temple et les modernes. Entre le modèle petite agriculture familiale et agriculture entrepreneuriale, appelons-le ainsi ou industrielle. Tomas Garcia Azcarate avait bien campé la nature du problème dans Sesame #2. Il y a eu aussi la publication des chiffres, très bons, de la progression des surfaces consacrées à la bio en 2018 en France par l’Agence bio. Des résultats qualifiés d’historiques par Terre-Net. La bio représente 7,5 % de la SAU en France, et jusqu’à 31 % en céréales. C’est ce secteur qui progresse le plus en un an, +26 % pour atteindre 319 000 hectares. Le rapport complet est là. Et un paradoxe. Si la bio progresse autant c’est aussi parce qu’elle s’industrialise.


Et puis il y a l’enquête de 60 millions de consommateurs qui a passé au crible 130 produits et fait exploser la relative indulgence qui prévalait jusqu’ici sur les produits bios. L’enquête de la revue (en kiosque) relève ainsi la présence de contaminants, le flou de l’étiquetage, les emballages, la légèreté des engagements sur le bien-être animal… et prodigue quelques recommandations, manger local et de saison, interdire la bouillie bordelaise… Le thread est long mais intéressant.


Cela n’aura pas l’impact que peut avoir la télé mais il y a fort à parier que cette publication va encore venir tendre, au sein même de la filière bio française, les différentes sensibilités [nous avions commis un thread sur le sujet il ya quelques semaines]. Comme par hasard dans le même temps, et le hasard fait bien les choses, Générations Futures publie une mise à jour de son enquête sur les résidus de pesticides dans les fruits et légumes conventionnels. En appuyant sur les chiffres des produits où ont été détectés des résidus quantifiables et non sur ceux où les normes de résidus (LMR) sont dépassées. Dans ses études au niveau européen, l’EFSA se montre bien plus optimiste et souligne que 96 % des échantillons analysés sont conformes.


Que tirer comme enseignement de cet épisode ? Que la guerre entre bio et conventionnelle se cristallise aujourd’hui dans les médias et que les seuls perdants seront peut-être les consommateurs qui ne saurons plus à quel sain(t) se vouer à moins que ce soit le sans ?  À moins de changer la classification des aliments ?


L’autre grande bagarre qui se joue dans les média ces temps-ci est celle qui oppose les associations antispécistes au monde de l’élevage. Un pas vient de nouveau d’être franchi avec la mise en ligne par une de ces associations d’une carte des élevages industriels établie sur la base des documents fournis à Greenpeace l’an passé dans le cadre de la loi sur l’accès aux documents administratif. Un peu à l’image de ce qui est survenu plus tôt dans l’année avec la carte des champs traités au glyphosate en Bretagne. Cette diffusion de données pourrait cependant tomber sous le coup de la loi mais en attendant, elle provoque la colère des éleveurs.


Voilà qui pose en tout cas avec une grande acuité la question de la transparence et de ses effets sur la liberté, sujet que nous aborderons dans le prochain Sesame cet automne. Observateur de ces mouvements radicaux Eddy Fougier constate aussi cette montée en puissance et parle aujourd’hui clairement de menace nouvelle pour les entreprises. De quoi presque regretter L214 pendant qu’en Suède, l’activisme antispéciste prend des atours plus qu’inquiétants, 200 agressions d’éleveurs ont été recensées en un an dans le pays.


Les données sont déjà d’ailleurs un enjeu majeur dans l’agriculture, leur stockage et leur exploitation font l’objet d’une charte, Data-Agri mis sur pied l’année dernière. Mais au delà de toutes ces secousses, ce week-end on pourra se plonger dans la chronique du livre récemment consacré aux vins natures (Christelle Pineau) par Valéry Rasplus,


Et écouter, ou réécouter de nouveau la voix de Michel Serres, disparu il y a quelques jours, au long de cinq entretiens confiés à France Culture en 2002 et notamment celui intitulé « la plainte, la panique et la peur se vendent bien » qui colle tellement bien aux offensives médiatiques en cours. Ou encore profiter de ce temps libre, pour aller arpenter les nouveaux territoires que la forêt gagne de décennie en décennie !




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